Success Story : Volumic 3D ou comment utiliser la fabrication additive pour dynamiter mon business
Stéphane Malaussena, co-fondateur Volumic 3D
Stéphane, peux-tu nous raconter comment tu as créé Volumic 3D ?
Dès 2000, j’avais une agence de communication avec mon associé et ami d’enfance, Gérard Luppino, autour de la visualisation 3D : dessin 3D pour l’architecture, le design d’objets… nous sommes des passionnés de longue date.
En 2011, nous sommes allés au salon Imagina à Monaco, et nous y avons vu les premières imprimantes 3D. On s’est dit « c’est notre avenir » : c’était l’avenir de la 3D, un prolongement de notre travail.
Nous avons eu rapidement une 2e révélation : quand on a voulu acheter notre 1e machine, on a été orientés vers des marques italiennes, espagnoles, américaines ou chinoises : aucune marque française n’était disponible ! On a commencé à utiliser des I3D étrangères, et on a voulu aller plus loin pour prendre un créneau qui venait de s’ouvrir.
Il faut se rendre compte que début 2012 il n’y avait rien, juste des brevets qui venaient de tomber, l’impression 3D était à ses débuts ! C’était une carte à jouer, et le made in France comptait pour nous. Nous avons donc investi, mais raisonnablement, car nous avons utilisé les fondamentaux de l’I3D en produisant nous-mêmes nos pièces. Nous avons utilisé notre 1e imprimante 3D pour créer notre propre imprimante 3D !
Ce n’est pas banal comme démarrage ! Vous visiez quel marché au départ ?
Nos premiers clients étaient des architectes, des designers industriels qui avaient besoin de prototypes. Au début, on produisait des pièces pour nos clients, mais rapidement ceux-ci ont été intéressés par nos machines. Et étant le seul français à l’époque, on a pu signer des grands groupes directement. Les grands groupes sont venus pour découvrir la technologie et faire leurs propres prototypes en interne, cela les intéressait beaucoup.
Nous avons donc pivoté vers la vente de machines et non plus seulement des pièces produites par nos machines.
Qu’avez-vous fait pour vous développer ?
On a voulu rapidement transformer notre nom en marque, avec du made in France, et on s’est focalisés sur les matériaux, la précision et la vitesse. A l’époque c’était des faiblesses. Les imprimantes 3D n’imprimaient que sur 2-3 matériaux : nous, on est allés sur une douzaine tout de suite. Ensuite, la précision nous a permis d’avoir de nouveaux clients chaque année. Et enfin est venue l’amélioration de la vitesse d’impression.
Savez-vous comment et pourquoi vos machines sont utilisées ?
Nos clients cherchent en grande partie à faire des prototypes et des maquettes. Ce qui a vu le jour quelques années après – depuis 2016-17 – c’est l’outillage et la pièce de remplacement. Quand une pièce casse, on peut la réimprimer en 3D ou se demander comment l’améliorer ! Ce sont les utilisateurs et industriels qui ont souhaité améliorer des pièces, et se faire de l’outillage pour mieux travailler et économiser. Ils faisaient l’inventaire des pièces d’outillage commandées en externe, et ont décidé de le faire en interne car grâce à nos imprimantes cela coûtait beaucoup moins cher. Par exemple dans une PME de la cosmétique, on a des bras qui posent les flacons dans des godets, sur un tapis roulant, pour être remplis. Avant, les godets étaient fabriqués en externe. Et là, nos clients ont utilisé les imprimantes 3D pour faire les godets, avec du plastique de bouteille recyclée. Pour 500€ de fabrication interne ils ont économisé 5 à 10k€ de fabrication en externe : la rentabilité est directe. Dans quelques cas, nos clients ont amorti la machine en une seule utilisation.
Comment est venue la notoriété ?
A la différence des startups, on a travaillé 5 ans dans l’ombre et on a été détectés seulement en 2017. Nous avons développé nos produits sur nos fonds propres, on s’est fait une clientèle, on a cherché la rentabilité. En 2017 Rising Sud nous a détectés, alors que nous ne cherchions pas spécialement la notoriété. Nous avons alors été mis en avant dans des événements, et on nous a proposé de participer au CES de Las Vegas, qui nous a apporté une visibilité mondiale.
Mais c’est surtout ce qu’on en fait après qui est important. Les trophées nous ont apporté de la reconnaissance de nos pairs, du secteur de la 3D, de nos partenaires et clients. Dans le CES, il faut être sélectionné, et ils ne recherchent pas forcément les machines, c’était difficile, et les professionnels savent que les entreprises sélectionnées sont remarquables. Cette participation nous a donc apporté aussi de la crédibilité auprès des grands comptes français et européens.
Comment avez-vous transformé cette notoriété soudaine en ventes ?
En B2B, les industriels ont leurs processus d’achats donc c’est difficile de concrétiser tout de suite notre notoriété en vente. Dans les mois suivants, on a pu faire des ventes naturelles ; mais c’est surtout en travaillant le portefeuille de rencontres faites là-bas, en travaillant nos contacts, qu’on a pu transformer l’essai. Le CES est un vrai événement « bankable » mais il faut le préparer avec des rencontres en amont, et travailler les contacts derrière, c’est indispensable.
Comment l’entreprise a-t-elle grandi ?
Les premières années, on a commencé à 2 et maintenant on est 18 !
Le 1er prototype a été réalisé en 2013 et la marque a été déposée en 2014. On a eu une croissance naturelle de 20% par an, on a surfé aussi sur la vague covid qui a mis les pleins feux sur la 3D et ses atouts : autonomie, produire localement… les gens ont voulu acheter des machines et on a aidé à faire des masques, des tests, des respirateurs… on a beaucoup œuvré et cela nous a donné une notoriété supplémentaire. Mais au niveau de l’industrie, cela a été au ralenti. Le télétravail ne pousse pas à utiliser les imprimantes… Malgré tous ces événements, nous avons connu une croissance constante. Après le CES on voulait se concentrer sur l’internationalisation et on n’a pas pu, puisque tout a été resserré. Du coup on va le faire cette année !
Alors quels sont vos projets de développement pour 2022 ?
L’an dernier nous avons sorti de nouvelles machines, designées pour le marché étranger et destinées à faciliter la maintenance. Quand on vend à l’étranger, on veut éviter de faire des retours en France pour réparation ou entretien. Ce ne sont pas des choses auxquelles on pense au début, quand on imagine le premier modèle !
Pour réaliser cette nouvelle série nous avons bénéficié de France Relance l’an dernier, et nous sommes très contents d’avoir eu cette aide : ça nous a permis de lancer une nouvelle machine, plus grand format la SH65 pour 65 cm (elle peut imprimer des pièces de 65 alors que les anciennes étaient à 30cm), avec une subvention à l’investissement et à la modernisation de nos outils.
Nous avons refait toute une ligne de production pour accélérer les cadences de fabrication et pouvoir augmenter de 50% nos capacités de production. Nous avions besoin de nous adapter à la nouvelle taille de machines, avec de l’outillage de plus grosse capacité. Nous avons aussi optimisé les procédés : nous concevons et fabriquons différemment les machines pour que ce soit plus facile à assembler, fabriquer. Nous ne sommes pas encore sur des cadences qui nécessitent de l’IoT ; on a une gamme de 3 machines, avec des composants identiques pour les 3 alors qu’avant on avait 3 composants différents. Tout cela nous fait gagner du temps et cela rationnalise les approvisionnements ce qui n’est pas négligeable aujourd’hui.
On est comme tout le monde dans le problème des semiconducteurs et des approvisionnements ! Pour s’en sortir, nous avons fait jouer notre réseau de partenaires : c’est là que c’est important d’avoir un réseau de partenaires sur qui compter, qui peuvent rester souples et s’adapter.
Nous avions déjà rationnalisé nos approvisionnements sur l’aluminium et nous n’avons donc pas trop souffert des problématiques de rupture de chaîne, notre chance c’est d’être en made in France, on est très peu impactés par les problèmes d’approvisionnement en Asie ; mais il y a toujours un tout petit composant qui peut arrêter la production. Les augmentations de prix, les délais qui ont doublé, nous ont ralenti en 2021. On a vendu tout ce que nous avons produit l’an dernier ! On repart donc pour produire à fond cette année pour augmenter nos ventes…
Cette année 2022 ce sera à fond dans la croissance, on a nos nouveaux modèles sortis en octobre, et on va exporter en Europe.
Que dire aux entreprises qui hésitent à prendre le virage de l’Industrie 4.0 ?
Aux entreprises qui hésitent, je dirais que même si ça peut paraître compliqué, le passage à l’Industrie 4.0 est plus qu’une nécessité. C’est un cap pris par le marché et il n’y a pas de possibilité de revenir en arrière. Aujourd’hui, ne pas prendre le virage c’est prendre un retard trop long à rattraper. Il faut passer aux nouveaux outils et aux nouvelles façons de penser, pour ne pas être distancé par les concurrents. Aujourd’hui c’est vraiment le conseil que je donne aux patrons comme moi : intégrer cette réflexion dans le développement de sa société est obligatoire. Les outils ont radicalement changé et on ne peut plus faire machine arrière et fonctionner comme avant. Les nouveaux procédés sont performants, que ce soit au niveau technique ou méthodologique. Il faut embrasser le changement, même si c’est difficile.
En résumé, il faut une étincelle, un conseil, une prise de conscience pour basculer dans les nouveaux outils et la digitalisation. Nous avons bénéficié de l’accompagnement d’un accélérateur, ça nous aidés à progresser. On a encore du boulot pour que la structure suive la croissance ! Nous sommes impatients d’aider d’autres entreprises à prendre le virage de l’Industrie du Futur, nous ferons partie des opérateurs technologiques de la plateforme d’accélération industrielle PRACCIIS.
Merci Stéphane et bonne route à Volumic 3D